La Finlande,
Un contrôle strict
TURKU - 27 et 28 NOVEMBRE 2017




L'agglomération de la ville de Turku est la troisième du pays de part sa population, elle est aussi le deuxième point d'entrée en Finlande.
Ce centre de transit dirigé par la Croix-Rouge ouvre en 1990, nous y sommes reçus par Heimo, directeur adjoint. Ce lieu d'accueil connaît trois implantations géographiques successives différentes, les deux premières étaient relativement proches du centre-ville ; la dernière, la troisième donc, date de 1998, c'est la plus excentrée, elle est située à environ 10 km de l'hôtel de ville de Turku et à environ 8 km de la gare principale.
Plusieurs bâtiments composent ce centre d'accueil, trois occupés exclusivement par des demandeurs d'asile et un quatrième partagé avec des Finlandais. Parmi les trois habités par des « migrants », un est la propriété d'un promoteur privé, un autre est possédé par l’Église évangélique, un, d'une capacité de 10 places, est dédié aux mineurs qui sont au nombre de cinq au moment où nous sommes reçus. Dans ce centre, les résidents doivent cuisiner par eux-mêmes, pour cela, ils partagent des cuisines, comme pour les douches et les toilettes. Ils disposent aussi d'un terrain de foot, de basket et d'une salle télé.
Une équipe de 22 à 24 personnes encadrent les 220 résidents de ce centre (d'une capacité d'accueil de 300 places), parmi lesquelles 40 à 50 enfants, alors qu'en 2015, la population de cette structure était composée à 95% d'hommes seuls. Depuis cette année-là, les personnes arrivent principalement d'Irak, Iran, Afghanistan et Somalie. La durée moyenne de leur séjour est de trois à six mois, cependant, certains demandeurs d'asile n'attendent pas l'arrivée à terme de leur procédure. Contrairement à la Belgique où les responsables doivent communiquer chaque matin la capacité d'accueil des centres dont ils ont la charge, ici, en Finlande, le MIGRI a développé un extranet qui permet d'avoir une cartographie précise du taux d'occupation de chaque centre et des personnes hébergées.
Parmi la population du centre, 30 à 40 résidents « officiellement » travaillent. Mais comme le précise notre interlocuteur, tout dépend de ce que l'on entend par « travailler », temps partiel, temps complet, le travail est-il réellement effectué ? Le contrat de travail est-il un contrat de « complaisance » signé par un employeur pensant aider ainsi un demandeur d'asile en apportant une preuve d'intégration ? En tout cas, accéder à un emploi par le marché ouvert sans une bonne maîtrise du finlandais est impossible pour un demandeur d'asile. D'ailleurs, des cours de finlandais sont dispensés tous les jours, du lundi au vendredi, par des professeurs diplômés.
Les relations avec le voisinage ne semblent marquées par aucune tension, ni défiance. Sans doute parce que le centre est situé dans une zone peu densément peuplée, proche d'une zone industrielle et aussi parce qu'une médiation avec les voisins a été organisée peu avant l'ouverture. Heimo nous explique que trois à quatre fois par an, plusieurs événements ouvrent le centre au public, pour Noël, pour fêter l'arrivée de l'été, des portes ouvertes aux voisins sont aussi organisées. Cependant, plus que véritables appels à visite auprès du public, ces événements ont plutôt pour objectif de rassembler les proches des demandeurs d'asile et les personnes qui travaillent en relation avec eux. De nombreux bénévoles, principalement de la Croix-Rouge, interviennent dans le centre, cela contribue aussi à son ouverture sur la société finlandaise. Comme nous l'avons vu dans tous les autres centres, de nombreux vélos sont visibles, les bus urbains qui passent toutes les 20 min permettent également aux résidents de se rendre en ville. Quand cela entre dans le cadre des services à fournir (santé, rendez-vous administratifs, etc.), le personnel du centre d'accueil peut également assurer le transport des résidents en ville.
Cet entretien nous permet de comprendre qu'aux yeux de ces demandeurs d'asile, c'est la fin du « big dream » selon les mots de notre interlocuteur. Psychologiquement, la situation de ces « migrants » s'est profondément dégradée, la déception, le désespoir se sont installés. Leur rêve européen est mort, d'autant plus que les critères de décision sont flous et opaques, pourquoi oui à certains et non à d'autres, ces questionnements finissent par introduire des tensions au sein des communautés.